PAPEETE, le 04 JUIN 2014. (COMMUNIQUE) Des images inédites de Tahiti ? C’est ce soir à 19h30 dans Patitifa. Polynésie 1ère propose aux téléspectateurs un superbe documentaire : « Le voyage cinématographique de Gaston Méliès à Tahiti ». Entre 1912 et 1913, Gaston Méliès, frère du célèbre Georges, effectue en bateau un périple cinématographique long de dix mois qui l’emmène de San Francisco à Yokohama, en passant par Tahiti, Bora Bora, la Nouvelle-Zélande, l’Australie, Java, Singapour, le Cambodge et le Vietnam. Le réalisateur, Raphaël Millet, revient pour Tahiti Infos sur ce projet inédit.
Interview de Raphaël Millet
Interview de Raphaël Millet
Vous avez présenté ce projet de documentaire il y a deux ans à l'Oceania Pitch du FIFO, cette expérience vous-a-t elle été utile ?
Raphaël Millet : Oui, cela a été déterminant car alors que j'étais venu avec un sujet documentaire sur la totalité du voyage de Gaston Méliès dans le Pacifique, en Asie du Sud-Est en Extrême-Orient, c'est au FIFO que les équipes de France Télévisions m'ont approché, en me demandant s'il serait possible de faire un sujet uniquement sur son séjour à Tahiti. C’est bien tombé, car c'est précisément sur cette partie du voyage qu'il reste le plus d'archives relatives à la venue de Gaston Méliès et surtout aux films qu'il tourna sur place.
Pourquoi Gaston Méliès était-il venu tourner dans le Pacifique ?
Gaston Méliès avait vécu de 1903 à 1912 aux États-Unis, où il représentait les intérêts de la famille Méliès. Il avait fini par progressivement devenir producteur, passant aussi parfois devant et derrière la caméra, se mettant à faire des films américains, et notamment des westerns des premiers temps. Il avait tout d'abord installé son studio près de New York, puis, afin de trouver le soleil toute l'année, au Texas, et enfin en Californie, non loin de ce qui allait devenir Hollywood. Un vrai précurseur donc, une sorte de pionnier. Et puis un jour, comme il l'a dit lui-même, il en a eu assez des cowboys. Il a senti qu'il lui fallait se renouveler, aller encore plus loin, se frotter à des contrées lointaines cinématographiquement vierges ou presque. Venant d'Europe, ayant traversé le continent américain d'Est en Ouest, il ne lui restait plus comme ultime frontière que le Pacifique. C'est pour cela qu'en juillet 1912, il embarque avec toute sa troupe à San Francisco, et part à l'aventure pour un périple cinématographique d'une dizaine de mois. Sur sa route, Tahiti est la première étape, et qui plus est une étape de choix dont il espère beaucoup.
Quelles étaient les principales difficultés à l'époque pour entreprendre ce genre d’aventure ?
Les moyens de transport étaient tout autres ! Pas d'avion. Des traversées maritimes de près d'une semaine. Et puis le matériel était autrement plus lourd et moins maniable qu'aujourd'hui. Mais ce sont des défis que Gaston Méliès - alors qu'il a déjà 60 ans – relève avec audace. Rien ne semble lui faire peur, pas même le fait de traîner avec lui une équipe d'une quinzaine de personnes. Imaginez un instant le travail de préparation que cela a représenté ! Se renseigner sur les lignes maritimes, les dates et horaires de bateaux. Louer les cabines, payer le fret, organiser les réservations d'hôtels. Pas d'Internet non plus, à l'époque ! Et une fois sur place, trouver les contacts, engager des acteurs parmi des gens qui ne l'avaient jamais été. C'est une énergie considérable qui, à mes yeux, force le respect. Reconstituer son parcours cent ans plus tard, avec les moyens qui sont aujourd'hui les nôtres, demeure suffisamment difficile. On ne peut qu'être ébahi de l'effort accompli en 1912 ! Il faut toutefois bien reconnaître qu'après dix mois de pérégrinations cinématographiques qui les ont emmenés des États-Unis au Japon en passant par le Pacifique Sud, Gaston Méliès et son épouse, Hortense, sont épuisés, comme il l'admet lui-même dans ses lettres.
Quel genre de réalisateur était-il ?
Il était plus un entrepreneur de cinéma, ou comme il le disait - à l'américaine - un "film manufacturer", qu'autre chose. Le statut du réalisateur n'était pas encore ce qu'il est devenu depuis, et quelqu'un comme Gaston Méliès se considérait avant tout comme un fabricant de cinéma. Il engageait toute une équipe, allant du scénariste à l'opérateur cinématographique, en passant par les acteurs et les laborantins. Et le cas échéant, Méliès, qui semblait avoir des idées bien arrêtées sur la manière de faire les choses, passait aux commandes de la caméra, ou bien revêtait un costume pour tenir un rôle à l'écran. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'avait pas peur de l'aventure et de l'innovation, même s'il ne fut pas un génie du cinéma au même titre que son jeune - et plus célèbre - frère Georges.
Qui avez-vous rencontré à Tahiti pour mettre en perspective ses films ?
À Tahiti, Flora Devatine a été absolument formidable. Sans elle, le documentaire ne serait pas ce qu'il est. Je crois que le sujet avait pour Flora une résonance particulière, car elle est éprise d'histoire et de culture polynésiennes. De plus, une partie de ses origines se trouvent à Papara, où avait séjourné Gaston Méliès, et où nous avons tourné. J'ai aussi obtenu un soutien moral important de la part de Michèle de Chazeaux, qui s'est montrée enthousiaste pour le projet dès le départ. Les différents descendants de Tati Salmon ont aussi été très accueillants, tout particulièrement Dorence Salmon et son épouse qui nous ont réservé un bel accueil, à l'équipe de tournage et moi-même, sur les terres mêmes de leur ancêtre Tati Salmon. Enfin, le groupe de chant de Papara, qui apparaît dans le film, nous a offert de très beaux himene, au bord de la mer, dont je garde un magnifique souvenir. J'ai aussi eu le plaisir de mener des entretiens filmés avec Constant Guéhennec (de la Société des Etudes Océaniennes), le professeur Riccardo Pineri ainsi que Jean-François Cauvin (en charge du service des archives audiovisuelles), qui tous sont dans le documentaire et contribuent à mettre très intelligemment en perspective cette histoire des premiers instants cinématographiques de Tahiti. Et puis à Paris, Jacques Malthête, arrière-petit-neveu de Gaston Méliès, nous a aimablement ouvert ses archives personnelles, rendant ainsi le projet vraiment possible.
Raphaël Millet : Oui, cela a été déterminant car alors que j'étais venu avec un sujet documentaire sur la totalité du voyage de Gaston Méliès dans le Pacifique, en Asie du Sud-Est en Extrême-Orient, c'est au FIFO que les équipes de France Télévisions m'ont approché, en me demandant s'il serait possible de faire un sujet uniquement sur son séjour à Tahiti. C’est bien tombé, car c'est précisément sur cette partie du voyage qu'il reste le plus d'archives relatives à la venue de Gaston Méliès et surtout aux films qu'il tourna sur place.
Pourquoi Gaston Méliès était-il venu tourner dans le Pacifique ?
Gaston Méliès avait vécu de 1903 à 1912 aux États-Unis, où il représentait les intérêts de la famille Méliès. Il avait fini par progressivement devenir producteur, passant aussi parfois devant et derrière la caméra, se mettant à faire des films américains, et notamment des westerns des premiers temps. Il avait tout d'abord installé son studio près de New York, puis, afin de trouver le soleil toute l'année, au Texas, et enfin en Californie, non loin de ce qui allait devenir Hollywood. Un vrai précurseur donc, une sorte de pionnier. Et puis un jour, comme il l'a dit lui-même, il en a eu assez des cowboys. Il a senti qu'il lui fallait se renouveler, aller encore plus loin, se frotter à des contrées lointaines cinématographiquement vierges ou presque. Venant d'Europe, ayant traversé le continent américain d'Est en Ouest, il ne lui restait plus comme ultime frontière que le Pacifique. C'est pour cela qu'en juillet 1912, il embarque avec toute sa troupe à San Francisco, et part à l'aventure pour un périple cinématographique d'une dizaine de mois. Sur sa route, Tahiti est la première étape, et qui plus est une étape de choix dont il espère beaucoup.
Quelles étaient les principales difficultés à l'époque pour entreprendre ce genre d’aventure ?
Les moyens de transport étaient tout autres ! Pas d'avion. Des traversées maritimes de près d'une semaine. Et puis le matériel était autrement plus lourd et moins maniable qu'aujourd'hui. Mais ce sont des défis que Gaston Méliès - alors qu'il a déjà 60 ans – relève avec audace. Rien ne semble lui faire peur, pas même le fait de traîner avec lui une équipe d'une quinzaine de personnes. Imaginez un instant le travail de préparation que cela a représenté ! Se renseigner sur les lignes maritimes, les dates et horaires de bateaux. Louer les cabines, payer le fret, organiser les réservations d'hôtels. Pas d'Internet non plus, à l'époque ! Et une fois sur place, trouver les contacts, engager des acteurs parmi des gens qui ne l'avaient jamais été. C'est une énergie considérable qui, à mes yeux, force le respect. Reconstituer son parcours cent ans plus tard, avec les moyens qui sont aujourd'hui les nôtres, demeure suffisamment difficile. On ne peut qu'être ébahi de l'effort accompli en 1912 ! Il faut toutefois bien reconnaître qu'après dix mois de pérégrinations cinématographiques qui les ont emmenés des États-Unis au Japon en passant par le Pacifique Sud, Gaston Méliès et son épouse, Hortense, sont épuisés, comme il l'admet lui-même dans ses lettres.
Quel genre de réalisateur était-il ?
Il était plus un entrepreneur de cinéma, ou comme il le disait - à l'américaine - un "film manufacturer", qu'autre chose. Le statut du réalisateur n'était pas encore ce qu'il est devenu depuis, et quelqu'un comme Gaston Méliès se considérait avant tout comme un fabricant de cinéma. Il engageait toute une équipe, allant du scénariste à l'opérateur cinématographique, en passant par les acteurs et les laborantins. Et le cas échéant, Méliès, qui semblait avoir des idées bien arrêtées sur la manière de faire les choses, passait aux commandes de la caméra, ou bien revêtait un costume pour tenir un rôle à l'écran. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'avait pas peur de l'aventure et de l'innovation, même s'il ne fut pas un génie du cinéma au même titre que son jeune - et plus célèbre - frère Georges.
Qui avez-vous rencontré à Tahiti pour mettre en perspective ses films ?
À Tahiti, Flora Devatine a été absolument formidable. Sans elle, le documentaire ne serait pas ce qu'il est. Je crois que le sujet avait pour Flora une résonance particulière, car elle est éprise d'histoire et de culture polynésiennes. De plus, une partie de ses origines se trouvent à Papara, où avait séjourné Gaston Méliès, et où nous avons tourné. J'ai aussi obtenu un soutien moral important de la part de Michèle de Chazeaux, qui s'est montrée enthousiaste pour le projet dès le départ. Les différents descendants de Tati Salmon ont aussi été très accueillants, tout particulièrement Dorence Salmon et son épouse qui nous ont réservé un bel accueil, à l'équipe de tournage et moi-même, sur les terres mêmes de leur ancêtre Tati Salmon. Enfin, le groupe de chant de Papara, qui apparaît dans le film, nous a offert de très beaux himene, au bord de la mer, dont je garde un magnifique souvenir. J'ai aussi eu le plaisir de mener des entretiens filmés avec Constant Guéhennec (de la Société des Etudes Océaniennes), le professeur Riccardo Pineri ainsi que Jean-François Cauvin (en charge du service des archives audiovisuelles), qui tous sont dans le documentaire et contribuent à mettre très intelligemment en perspective cette histoire des premiers instants cinématographiques de Tahiti. Et puis à Paris, Jacques Malthête, arrière-petit-neveu de Gaston Méliès, nous a aimablement ouvert ses archives personnelles, rendant ainsi le projet vraiment possible.
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