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Les commerçants très remontés contre la loi sur la concurrence

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Les commerçants très remontés contre la loi sur la concurrence
PAPEETE, le 23 juillet 2014 - La Fédération Générale du Commerce a décidé d’attaquer devant le Conseil d’Etat la loi sur la Concurrence fraichement votée en Polynésie. Son président Gilles Yau assure que ce texte pris dans l’urgence et sans tenir compte des avis du CESC et des professionnels aura beaucoup d’effets pervers sur l'économie. Interview :


Pourquoi attaquez-vous cette loi ?
On voit bien qu’elle est faite uniquement sous le prisme du secteur public avec son pendant, une réglementation uniquement répressive, beaucoup d’amendes très élevées… Vraiment on se pose la question, à quoi sert le statut d’autonomie interne si c’est pour faire un mauvais copier-coller du texte français ?

Les technocrates et mercenaires dans les ministères ont vraiment manqué d’imagination et n’ont pas su tenir compte de l’avis des économistes, des spécialistes de la concurrence, du CESC, de l’Assemblée et des organisations patronales.

Cette réforme n’est pas assez libérale ?
Il y a des atteintes à la liberté du commerce et de nombreuses restrictions, avec une mainmise de l’administration à tous les stades. C’est une vision d’une économie extrêmement administrée, contraire même aux promesses du Plan de Relance. Dans ce texte on a pris le pire du texte français, de celui de Nouvelle Calédonie et du texte de Victorin Lurel applicable dans les DOM. On aurait pu faire beaucoup mieux.

Sur quels points ?
Le texte parle d’abus de position dominante, comme dans la loi européenne, mais aussi de position dominante, repris sur le texte calédonien. Donc dès que vous dépassez 35% de parts de marché dans votre zone de chalandise, c’est-à-dire à 15 minutes en voiture, vous êtes en position dominante et donc en infraction. En France, c’est abuser de cette position qui est une infraction : empêcher les concurrents de rentrer, exercer des pressions sur les fournisseurs, déréférencer les produits… Ça c’est un abus. Mais là, dans les îles, une supérette peut très vite être à 35%, et s’expose à des amendes (considérables) ! A un moment donné il faut réfléchir à ce que l’on fait.

Autre point, le texte dit que sur simple présomption du président de la Haute Autorité il peut diligenter une enquête dans les deux mois et il peut vous forcer à vendre la société, à céder vos parts etc. grâce à une injonction économique. Dans le texte il n’y a même pas de procédure contradictoire, on ne peut pas se défendre… C’est quand même le fait du prince !

Vous critiquez beaucoup le fonctionnement de cette Haute Autorité de la Concurrence…
Sa composition ne permet pas d’en garantir l’indépendance, puisque c’est le Conseil des ministres qui va en désigner les membres ! On l’a dit, le CESC l’a dit, l’Assemblée l’a dit : il faut qu’une commission de l’Assemblée valide les nominations. Là c’est une invention totalement polynésienne… On a fait des institutions quand même, pour séparer les pouvoirs ! On a tous les ingrédients pour que les acteurs économiques soient pris en étau [par le gouvernement].

Toujours dans le fonctionnement de cette Haute Autorité, les agents instructeurs qui vont mener l’enquête sont les agents de la DGAE. Donc ça veut dire que la DGAE fait la pluie et le beau temps dans la Haute Autorité puisqu’elle instruit les dossiers, et à l’extérieur puisque c’est elle qui va coller des amendes à tous les agents économiques qui n’ont pas respecté le point-virgule…

Qu’auriez-vous préféré comme solution ?
Dans les autres textes sur la concurrence, les trois institutions participaient à nommer les membres, c’est-à-dire le CESC, l’Assemblée et l’exécutif. Je pense que c’est un équilibre qui permet d’avoir des sensibilités différentes et garantir une indépendance. Nous avions aussi proposé de créer une Haute Autorité commune avec la Nouvelle Calédonie, mais ça a été refusé.

Enfin, dans le champ d’application de la loi, la haute Autorité ne sera pas consultée par le Pays sur tous les domaines où il est partie prenante : les industries de réseau, les transports… Ils restent juge et partie, mais il n’y a pas lieu de s’accorder des passe-droits, ces charges pèsent lourd sur le budget des ménages ! Tout ça ne va pas aider à lutter contre la vie chère.

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